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Analyse à long terme d’une série opératoire de 157 Chiari avec syringomyélie : quels enseignements ?

Dr Nozar Aghakhani, Pr Fabrice Parker

mercredi 3 décembre 2008

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Analyse à long terme d’une série opératoire de 157 Chiari avec syringomyélie : quels enseignements ?

Les données récentes de l’IRM de flux, en apportant une dimension dynamique, ont contribué à une meilleure compréhension de la physiopathologie des syringomyélies. Malgré cette avancée beaucoup de questions restent sans réponse et cela rend difficile une prise en charge optimale et standardisée des patients. En analysant sur le plan clinique et en imagerie (imagerie morphologique et fonctionnelle-flux) des patients porteurs de syringomyélie foraminale, nous avons tenté d’apporter des réponses à certaines de ces questions : quand faut-il traiter les patients ? Quelle doit être l’étendue de la décompression de la fosse postérieure ? Quels sont les meilleurs facteurs pronostiques préopératoires et les éléments de surveillance postopératoires ? Que proposer en cas d’échec de première intervention ? Pour répondre à ces questions nous avons analysé les données cliniques et radiologiques et les résultats à long termes (5 ans de suivi) d’une série consécutive de 157 patients (74 hommes et 83 femmes). Sur le plan clinique une analyse minutieuse a permis de classer les symptômes en quatre syndromes (syndrome syringomyélique ou centromédullaire, syndrome supramédullaire, syndrome de l’atteinte des voies longues et la douleur). L’IRM a permis d’analyser la charnière cervico-occipitale (nous avons proposé et validé une classification pour préciser le degré de l’obstruction foraminale), l’étendue du kyste ( longueur et l’index de Vaquero). L’IRM de flux permettait d’analyser la circulation de liquide cérébro-spinal au niveau de la charnière, dans le kyste et dans les espaces périmédullaires. L’évolution de chaque syndrome a été étudiée en postopératoire, le résultat final a été obtenu par comparaison des différents scores en pré et post opératoire. La technique opératoire était toujours la même (décompression large de la fosse postérieure, ouverture arachnoïdienne et adhésioloyse si nécessaire, plastie large et étanche de la dure mère).

L’âge moyen était de 38.3 ans (16 à 75 ans). La douleur et les troubles sensitifs étaient les symptômes révélateurs les plus fréquents. La durée moyenne d’évolution de la pathologie avant la prise en charge chirurgicale était de 8.2 ans. La durée moyenne de suivi était de 7.3 ans (de 6 à 17 ans). La douleur, le syndrome centromédullaire et supramédullaire s’amélioraient significativement (respectivement p0.0001, p0.0001 et p0.001) alors que l’atteinte des vois longue et l’ASIA moteur restaient stable.

Nous déplorons un cas de décès (0.63%). Il s’agissait d’un patient paraplégique qui est décédé d’une embolie pulmonaire massive 5 jours après l’opération. Six patients (3.82%) ont eu une méningite dont deux étaient aseptiques, Six (3.82%) autres patients ont eu une fièvre isolée. Deux (1.27%) ont eu une arachnoïdocèle, et une fuite du LCS nécessitant une reprise chirurgicale. Six patients (3.82%) ont été réopérés en moyenne 38 mois après l’opération initiale (6 jours à 60 mois) pour cause de progression des symptômes (deux DFP, trois DVP et une tonsillectomie).

L’intervention chirurgicale agit de façon significative pour réduire la taille du kyste syringomyélique (p 0,001). Dans 13,66 % des cas (36 patients) le kyste a complètement disparu. Dans 8 cas seulement (3,08 %) la taille du kyste a été augmentée après l’intervention (passage de classe B en A).

En fin d’étude 99 patients (63.06%) étaient améliorés, 48 (30.58%) étaient stabilisés et 9 (5.73 %) étaient aggravés. Un seul patient est décédé durant la période postopératoire. L’analyse statistique a permis de démontrer que l’âge et le statut neurologique préopératoire étaient les facteurs pronostiques les plus importants. L’existence d’une arachnoïdite était clairement un facteur de mauvais pronostic ainsi que la prédominance de l’atteinte des voies longues. L’arachnoïdite et l’invagination basilaire étaient associées à un mauvais état clinique (p = 0.05 and 0.0001, respectivement). La taille de kyste n’était pas lié au grade clinique en préopératoire mais son étendu en postopératoire était corrélé au résultat clinique (p= 0.002). une vitesse diastolique intrakystique élevée était corrélée à un grand kyste et un état clinique grave et évolutif (p=0.05)

Nous pouvons donc apporter des réponses aux questions que nous nous étions posées initialement. Nous avons clairement démontré que le statut neurologique préopératoire était le facteur pronostique le plus important et que la majorité (90%) des patients étaient améliorés ou stabilisés par la chirurgie, ce qui nous permettait d’apporter une réponse pour le timing opératoire : Nous devons proposer une opération le plus tôt possible à partir du moment où une évolutivité clinique est constatée. Nous avons par ailleurs démontré que l’étendue d’un kyste était corrélée au degré de sténose foraminale (p=0.03) et la persistance d’un kyste tendu en postopératoire était corrélée (p=0.002) à une mauvaise évolution postopératoire, ce qui nous pousse à dire que l’affaissement du kyste en postopératoire doit être l’objectif recherché et que cela ne peut s’obtenir qu’au prix d’une décompression le plus large possible. La présence d’un kyste tendu en postopératoire doit instaurer une surveillance plus attentive. En ce qui concerne les échecs de l’opération initiale l’IRM de flux est d’un grand secours et nous permet de proposer un algorithme décisionnel précis. Si en postopératoire l’aggravation continue, il faut minutieusement analyser la qualité de la libération foraminale sur le plan morphologique (IRM et TDM, taille de la grande citerne) mais surtout sur le plan dynamique (IRM de flux). Si la charnière n’est pas anatomiquement correctement décomprimée ou si malgré une décompression anatomiquement satisfaisante la circulation du LCS n’est pas corrigée, Nous proposons une ré-intervention sur la charnière pour compléter la décompression et rétablir une meilleure circulation du LCS. Par contre en cas de décompression correcte si un gros kyste persiste nous proposons de discuter une dérivation ystopéritonéale. Les cas où la charnière est largement décomprimée et où le kyste est affaissé sont des situations pour lesquelles il n’y a à ce jour et à notre connaissance pas de solution chirurgicale.

Les résultats de ces études ont été soumis et acceptés par la revue Neurosurgery (IF=3,007) et doivent être publiés prochainement.

Le support de présentation

Dr Nozar Aghakhani, Pr Fabrice Parker, CHU de Bicêtre